Pour leur programme de musique XVIIe siècle, les deux musiciens n’ont pas choisi les œuvres de compositeurs ayant encombré les dictionnaires de la musique. Instrumentistes dans divers cours princières, parfois courant de l’une à l’autre dans l’empire, ils ont laissé quelques œuvres, quand elles ont été conservées ou écrites...
Alessandro Stradella sort du lot par un important catalogue et des emplois institutionnels, telle la direction musicale du Teatro di Falcone de Gènes.
Mis à part Biagio Marini (1594-1663), qui a accumulé des emplois dans de nombreuses villes de l’empire et assumé trois mariages, les autres sont liés à la chronique criminelle.
D’où le titre générique du programme, « Assassins et assassinés ».
Ignazio Albertini (1644-1685) musicien de l’impératrice Eleonora de Mantoue à Vienne, meurt poignardé.
Le théorbiste Bellerofonte Castaldi (1581-1649), au service du cardinal Alessandro d’Este, est aussi guitariste, luthiste, poète satirique qui ne s’en laisse pas conter, prend part à l’exécution de l’assassin de son frère.
Alessandro Stradella (1639-1682) prend le large avec la maîtresse d’un autre.
Ils sont rattrapés, entrent chacun dans un couvent, mais sont forcés au mariage.
Après avoir signé le contrat de mariage, Castaldi est attaqué et laissé pour mort par deux individus qui se réfugient à l’ambassade de France, provoquant quelques perturbations dans les relations diplomatiques. En poste à Gènes, il se fait assassiner pour de bon.
Le violoniste Giovanni Antonio Pandolfi Mealli (1624-1687), en poste à Messine, assassine un chanteur-castrat, peut être en raison d’un désaccord dans le conflit franco-espagnol pour la possession de la ville.
Ce n’est pas vraiment là un critère musical, le crime, pas directement, mais tout en piquant la curiosité, évoquant la violence du temps, et une musique n’adoucissant pas les mœurs des musiciens, c’est une bonne méthode pour dévoiler un art certainement plus intégré dans la bonne société du temps que fixé dans la mémoire collective actuelle.
Paradoxalement, cette musique aux accents populaires, musique profane, faisant la part belle à l’improvisation, aux démonstrations d’effets et de virtuosité, une musique d’instrumentistes avant que de compositeurs, la normalité d’alors est aujourd’hui surprenante (et l’exception du temps aujourd’hui normalité).
En tout cas, c'est un beau point de vue et un bel exercice musical, où l’histoire est le prétexte et non le but.